23/03/2015

[Lecture] Que la joie demeure

Ce récit est à la fois troublant et parfaitement rassurant. Troublant car le narrateur se retrouve confronté à des situations pour lesquelles il est difficile de poser un jugement définitif, rassurant car ce flottement de la réalité, nous le connaissons tous plus ou moins dans notre vie de tous les jours. 

Solaro, personnage tout à fait banal dans les premières pages se révèle d'une innocente sincérité qui va le rendre non seulement suspect mais coupable aux yeux de ses congénères. Accusé de meurtre, il ne cherchera pas à se défendre et laissera plutôt son avocat, les témoins, l'avocat général, la présidente de la cour et surtout les jurés, décider seuls à partir de leurs représentations de ce que le narrateur pourrait être : un être insensible. 




"Il n'y a de société possible que parce qu'il y a des choses qu'il n'est pas possible d'accepter, des choses qu'il est même interdit d'accepter." A elle seule, cette citation résume l'ambition de ce récit.


Alors que le narrateur connaît des circonstances successives que d'aucun qualifierait de spirale de l'échec, il demeure serein et mieux, continu de déguster les milles plaisirs du quotidien. Son stoïcisme face aux événements n'a d'égal que la philosophie qu'il pratique : Qu'est ce qui est aimable dans la présente situation ? Car ne nous y trompons pas, Solaro est plus un sphynx qu'un être passif qui serait dépourvu de volonté. 
Acceptes ce qui t'arrive, c'est le plus sûr moyen de cultiver la joie. Un stoïcisme fait de volonté et du refus de l'évidence au profit de la spontanéité en quelque sorte. 
Car la joie dont témoigne ici le narrateur se révèle un sentiment profond, intelligent et constructif qui donne des raisons d'aimer les situations les plus routinières. Les plus dramatiques aussi. C'est sans aucun doute cela qui donne à ce récit une clé de lecture du monde contemporain.

La joie, Charles PEPIN, Allary Editions, 2015

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