23/03/2010

[Portrait] L'indomptable Martin Hirsch


Martin Hirsch, Haut commissaire aux solidarités actives et à la jeunesse vient de faire les frais du remaniement technique du gouvernement Fillon 4. Pour être plus exact, il quitte le gouvernement à sa demande, seule la date lui a été imposée. Détesté, jalousé ou encore encensé, cet Homme politique inclassable car multiple vient de vivre une expérience que beaucoup d'autres ont connu avant lui. Mais pas avec la même classe.


Avant d'entrer dans le gouvernement à travers un statut à part, Martin Hirsch était déjà un homme public. Par ses nombreux engagements associatifs mais également à travers ses écrits. Enfin, par le biais des responsabilités qu'il a exercé au sein de cabinets ministériels comme ceux de Martine Aubry et Bernard Kouchner. Il est un intellectuel au sens politique du terme. C'est à dire qu'il connaît autant les rouages techniques de l'administration que les arguments du débat citoyen. Ni véritablement Homme politique, ni Haut fonctionnaire à part entière, il est les deux à la fois et refuse systématiquement de choisir. Au-delà de ses compétences, c'est son intuition qu'il propose.

Président d'Emmaüs France jusqu'à ce qu'il soit nommé Haut Commissaire, il était parallèlement directeur général de l'agence des solidarités actives qu'il a lui-même fondé pour expérimenter ce qui s'appellera plus tard le RSA. C'est d'ailleurs à l'époque du gouvernement villepin où il présidait la commission Familles, vulnérabilité et pauvreté qu'il élabora ce nouveau dispositif. Fidèle à ses valeurs et convaincu par cette réforme, il rencontra durant la campagne présidentielle les deux principaux candidats PS et UMP afin de le faire entendre le bien fondé de son projet. C'est ainsi qu'on a oublié depuis que le RSA figurait sur le programme présidentiel de Ségolène Royal comme sur celui de Nicolas Sarkozy.

Pour ma part, c'est à travers sa plume que j'ai découvert ce militant car plus que par engagement, c'est par militantisme qu'il a assumé ses fonctions gouvernementales. Dans Manifeste contre la pauvreté, il présente sous un regard moins compassionnel d'empathique la réalité des plus modestes. Sans émotion puérile avec le souci de témoigner.

A l'heure de son départ, il laisse un bilan certes loin d'être achevé néanmoins intéressant. Mais ne nous avait-il pas avertit qu'il ne souhaitait pas s'inscrire dans une action durable mais juste vouloir obtenir les garanties de la mise en oeuvre de ce pourquoi il avait accepté la mission.
Libéré des contraintes auxquelles il était parfois assujetti, faisons lui confiance pour qu'il continue, avec autant de convictions, son combat contre la pauvreté.
Mais la plus grande victoire dont peut s'ennorgueuillir Martin Hirsch c'est d'avoir cassé les idées reçues sur les pauvres et réunis les mécènes et les acteurs sociaux afin de faire vivre de projets communs. C'est à partir de ses idées neuves tels que les start up social et autres dérivés que l'on a enif pu envisager de réunir l'économique et le social sous un même projecteur.
A propos de la politique dite d'ouverture à laquelle il a participé, 3 ans après, je maintiens ce que j'avais écrit en 2007.
Un engagement personnel en faveur de la société civile au-delà de toutes idéologies.La nomination de personnalités à sensibilité de gauche autour d’un projet de gouvernement de droite provoque une incompréhension légitime. Néanmoins, plus je réfléchis à l’entrée de Bernard Kouchner dans le gouvernement opposé aux valeurs qu’il porte et plus je comprends son acte. Voire même je l’admire à présent. Car en dépit des reproches qu’on lui porte, le « French doctor » démontre par cet acte son engagement moral. Il s’agit en effet d’un engagement personnel – et à ce titre dénué d’idéologies – qui témoigne de la nécessité d’une intervention dans les relations internationales au nom d’une éthique humaniste. Hubert Védrine, ancien ministre à ce poste, déclare que cette mission dépasse les clivages politiciens. Un humanitaire comme ministre des affaires étrangères et européennes, c’est plus qu’un symbole, mais un véritable message qui redonne du sens à l’action.
Bien sûr, lorsque l'on porte une idée certaine de la rénovation d'une société et que l'on détient les compétences qui prévalent à cette fonction, il est certes plus aisé de les mettre en oeuvre au sein d'un gouvernement avec lequel on partage des valeurs communes. Toutefois, il demeure possible d'agir de l'intérieur d'un système qui nous est éloigné idéologiquement si l'on en fait un combat au nom d'un peuple. C'est, il me semble, cette idée que défend Bernard Kouchner en acceptant la fonction qu'il occupe désormais. De ce fait, hormis la majorité qu'il représente dorénavant, il fait la preuve qu'il est possible de mener une action de l'intérieur. De ce point de vue, le réseau qu’il s’est constitué dans le cadre des ses nombreuses expériences va lui servir de repères.
Il en est de même pour la décision de Martin Hirsch. Ce qui le guide surtout à mon sens, c’est l’état actuel de la France qui ne saurait attendre une rénovation. En témoigne particulièrement la situation croissante de la vulnérabilité d’une partie de la population. Partant de ce constat, aucune objection idéologique n’est suffisante pour rester impassible. Même lorsqu’il s’agit d’une stratégie politique. L’enjeu consiste à conserver une ligne claire en tant que technicien d’une tâche.

Finalement, il me vient à penser que par cette démarche d’ouverture le nouveau Président de la République tient moins à la nature de l’action qu’il souhaite mener qu’au fait d’y tenir une place centrale. Et ainsi d’être suivi par une majorité de partisan. C’est peut être au fond, cette seule valorisation qu’il poursuit.

En tant qu’acteurs de terrain et par conséquent habitué aux situations de crises, je pense que les deux personnalités ont la capacité d’initier, chacun à leur place respective, une pression intérieure suffisante afin de constituer un contre pouvoir. Il n’en demeure pas moins qu’ils vont devoir mener de front un dur combat au nom des valeurs qu’ils défendent. C’est pour cela que leurs choix sont à mes yeux tout à fait respectables.

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